Báo cáo khoa học: " Zonation biogéographique des Alpes dauphinoises à partir de l’étude comparative des sapinières à Abies alba et des pessières à Picea abies"
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- Article original Zonation biogéographique des Alpes dauphinoises à partir de l’étude comparative des sapinières à Abies alba et des pessières à Picea abies M Oberlinkels G Cadel G Pautou B Lachet 1 1 Université Joseph Fourier, laboratoires d’écologie végétale, BP 53X; 2 CEA/CENG, département recherche fondamentale/groupe informatique, de BP 85X, 38041 Grenoble cedex, France (Reçu le 23 février 1989; accepté le 5 avril 1990) Résumé — Si les biologistes s’accordent pour distinguer 3 entités phytogéographiques principales dans alpin (Alpes externes, Alpes intermédiaires, Alpes internes) cette unanimité disparaît l’arc il s’agit d’en fixer les limites respectives. Les auteurs abordent ce quand problème dans les Alpes dauphinoises, à la latitude de Grenoble. Les interprétations proposées reposent sur un traitement statistique effectué sur 274 relevés phytoécologiques et plus de 300 espèces ligneuses et herba- cées. Ces relevés appartiennent à des hêtraies-sapinières et sapinières-pessières et se distribuent sur un transect W-E depuis la Chartreuse jusqu’au Briançonnais. Ce choix se justifie par le fait que le hêtre, le sapin et l’épicéa sont largement représentés dans les Alpes dauphinoises et constituent les espèces majeures dans la plupart des peuplements montagnards. Des AFC** et des CAH*** effectués sur ce corps de données ont conduit les auteurs à préciser les caractéristiques phytogéographiques de chaque type de peuplement. En outre, une analyse des relevés par la méthode de l’information mutuelle a débouché sur une caractérisation des différents secteurs et sous-secteurs à l’aide d’espèces herbacées ayant une distribution et une écologie bien affirmées. Les auteurs discutent la validité des découpages qu’ils avaient proposés dans un travail antérieur (Cadel et Pautou, 1984) : la division des Alpes internes en 2 sous-secteurs est confirmée par les analyses multidimensionnelles; en revanche, la partition des Alpes intermédiaires en 2 sous- secteurs ne s’impose pas avec la même netteté. Abies alba / Alpes occidentales / analyse statistique / espèce indicatrice / phytoécologie / Picea abies Summary — Biogeographic zonation of the Dauphiné Alps based comparative study of on a Ables alba fir plantationstandlpine range: thepruce plantations. Biologistsndave distinguished 3 Picea abies s h phytogeographical in he a areas external Alps, intermediate a internal how- Alps; ever, their respective limits have yet been determined. This problem has been studied in the not Dauphiné Alps, on a latitude with Grenoble. The interpretations put forward are based on a statistical analysis of 274 phytoecological samples and over 300 herbaceous and ligneous species. These samples involved beech - fir and fir- spruce stands and were distributed along a W-E transect from Chartreuse to Briançon. This selection was * Correspondance et tirés à part. ** AFC : analyse factorielle des correspondances. *** CAH : classification ascendante hiérarchique.
- in the Dauphiné made due to the fact that the beech, the fir and the spruce are heavily represented the main species found in most mountainous populations. Alps and constitute carried out on classification) FAA (factorial agreement analysis) and HAC (hierarchic ascending of popula- type characteristics of each the total data resulted in the determination of phytogeographic a characterization of tion. In addition, sample analysis via the mutual information method resulted in well established distribution and the various sectors and subsectors using herbaceous species with a ecology. is discussed (Cadel The validity of the divisions which the authors had proposed in a former study multidimen- and Pautou, 1984): the division of the internal Alps into 2 subsectors is corroborated by is not as clear-cut. sional analysis; however, the division of the intermediate Alps into 2 subsectors / Picea abies Abies alba / western Alps / statistical analysis / indicator species / phytoecology grandes ca- les Rappelons rapidement INTRODUCTION ractéristiques phytogéographiques des 5 niveaux retenus : Les phytogéographes alpins reconnais- sent l’existence de 2 entités phytogéogra- Alpes externes phiques majeures dans la chaîne alpine : celle des Alpes externes et celle des Alpes internes. Depuis une quarantaine d’an- comprennent les Préalpes calcaires Elles nées, plusieurs auteurs de langue germa- et les versants ouest de Belledonne et du nique et notamment Kuoch (1954) ont pro- Taillefer sur roche mère acide. Le charme posé d’invidualiser une zone des Alpes et le hêtre y trouvent leur optimum mais le intermédiaires ou Zwischenalpen dans les sapin et l’épicéa jouent aussi un grand rôle Alpes centrales et orientales; plus récem- dans la dynamique des séries. ment Mayer (1963, 1974) a, pour les mêmes régions, réexaminé en détail cette question. Alpes intermédiaires Dans les Alpes occidentales, Ozenda (1966) fut le premier à distinguer une zone au niveau du bassin de représentées Bien des Alpes intermédiaires. Plus récemment elles sont caractérisées Bourg d’Oisans, Cadel et Pautou (1984) ont proposé pour par l’absence du charme dans le collinéen, le Dauphiné un découpage phytogéogra- la présence du hêtre, du sapin, de l’épicéa phique en 5 niveaux (fig 2), les Alpes inter- dans le montagnard; dans le subalpin, épi- médiaires et les Alpes internes étant cha- céa, pin à crochets et pin cembro peuvent en deux sous-secteurs. subdivisée être présents dans l’ensemble de la zone cune le faire également pour les pourrait (Pautou et al, 1986). Deux sous-secteurs On Alpes externes mais les deux sous- distingués. sont secteurs ainsi individualisés seraient plus le reflet de caractéristiques édaphiques Sous-secteur ouest que climatiques; c’est la raison pour la- quelle, les auteurs considèrent que les Le charme a disparu, les hêtraies sèches Alpes externes constituent une seule enti- occupent les adrets (Gillot, 1981).Dans té.
- les ubacs le rôle principal est joué par une rare et le pin sylvestre domine sur les est hêtraie-sapinière dont la composition floris- adrets. En ubac, le sapin et l’épicéa for- tique est intermédiaire entre l’Abieto- ment des forêts proches de l’Abietetum Fagetum et l’Abietetum albae. Les groupe- albae décrit par Kuoch (1954), association ments subalpins sont voisins de ceux des encore riche en espèces des Fagetalia syl- Alpes externes sur roche mère acide, en vaticae. Le mélèze est présent dans le raison notamment de l’absence du mélèze. montagnard et le subalpin inférieur (Du- chaufour et Fourchy, 1952). Sous-secteur est Alpes internes L’étage collinéen étant très réduit, c’est au niveau du montagnard que ce sous- Elles débutent à l’est des Grandes secteur s’individualise le mieux. Le hêtre Rousses et des premières crêtes du mas-
- Sous-secteur est sif des Ecrins; on peut aussi les subdiviser en 2 sous-secteurs. partie la plus xérique qui corres- C’est la pond au Briançonnais (Cadel et Gilot, 1963). Dans le montagnard, les adrets Sous-secteur ouest sont occupés par des pinèdes sylvestres, plus rarement par des pinèdes à crochets. II correspond à la Haute-Romanche et au Les ubacs sont également le domaine des Vénéon. Le climax des adrets est difficile à pinèdes mais aussi des mélézeins imaginer à cause du fort déboisement ac- (Duchaufour et Fourchy, 1952; Ozenda et tuel. En ubac, pessières et mélézeins Cadel, 1981); les essences sociales ex- constituent la totalité des forêts en raison ternes sont absentes (hêtre) ou rares de la disparition totale du hêtre et du (sapin, épicéa). Dans le subalpin d’adret, sapin. Les espèces des Fagetalia sylvati- le pin à crochets règne en maître. En cae, sont encore nombreuses. Les es- ubac, le pin à crochets, le pin cembro, le pèces des Betulo-Adenostyletea sont bien mélèze, et plus rarement le sapin, se par- représentées dans les mélézeins à hautes tagent l’espace; les groupements ont une herbes.
- signification sur le ayant, par la même, de sèche car les espèces tonalité une assez plan biogéographique ? mégaphorbiaie sont absentes. La productivité primaire des sapinières et de la présente étude est de L’objectif - des pessières présente-t-elle des valeurs tester la validité du découpage proposé différentes dans chacun des secteurs, si par une analyse quantitative de données on se place dans des conditions station- floristiques et écologiques. Dans cette nelles comparables ? Dans ce cas, les es- pris comme descrip- étude, nous avons pèces individualisant les secteurs biogéo- sapinières et les pessières. Ce teurs les être aussi pourraient graphiques choix se justifie par le fait que ces groupe- considérées comme des descripteurs du ments sont présents, presque sans dis- fonctionnement des écosystèmes de mon- continuité, depuis la Chartreuse et le Ver- cors jusqu’en Briançonnais. Mais ce choix tagne. est bien sûr restrictif et ne saurait à lui seul caractériser chaque zone dans sa globali- MÉTHODES té; il permet, néanmoins, d’observer le long du transect étudié, la modification d’un écosystème forestier clef pour la compré- Recueil des données sur le terrain hension de la végétation des Alpes dauphi- noises. Nous nous proposons de répondre aux Deux cent soixante-quatorze relevés réunissant de 300 espèces constituent le support de plus questions suivantes : l’information. Pour traiter cette masse de don- le découpage proposé résistera-t-il à une - nées, notamment dans son aspect quantitatif, analyse quantitative reposant sur un nous avons tout d’abord fait appel à 2 méthodes échantillonnage phytoécologique homo- de calcul multidimensionnelles couramment em- ployées en phytoécologie : l’analyse factorielle gène effectué le long d’un transect partant des correspondances (AFC) et la classification de la Chartreuse, pôle d’humidité des Pré- ascendante hiérarchique (CAH). Une troisième alpes et se terminant dans le Briançon- méthode, l’Information mutuelle nous a apporté nais, pôle de sécheresse des Alpes in- des précisions supplémentaires (Daget et al, ternes ? 1972). Le passage d’un secteur en position ex- Les relevés de végétation se répartissent - terne à un secteur plus continental se tra- ainsi : - Alpes externes : Chartreuse (Bartoli, 1962; Richard, non publié); Vercors (Faure, duit-il par des changements qualitatifs ou 1968); Belledonne et Taillefer (Cadel et al, non quantitatifs de la composition floristique ? publié; Ferrand, 1984). - Alpes intermédiaires : Sont-ils de faible ou de forte ampleur ? In- Oisans (Oberlinkels, 1987; Pautou, Cadel et terviennent-ils de façon brutale ou progres- Gillot, non publié). - Alpes internes : Massif des sive ? Ecrins (Oberlinkels, 1983; Meyer, 1981);Brian- çonnais et Queyras (Cadel, publié). non Dans le cas des sapinières et des pes- - Les relevés ont été effectués en ubac dans sières, combien de types de groupements les étages montagnard et subalpin inférieur seront validés par les analyses statistiques entre 640 et 2 060 m. et quel est le degré de liaison de chacun Le corps de données comporte des relevés d’entre eux avec les différentes entités roche mère acide et sur roche mère carbo- sur phytogéographiques proposées ? natée. Dans la pratique, un échantillonnage sys- Peut-on individualiser un lot d’espèces tématique n’a pu être totalement réalisé dans - les zones où les roches calcaires sont peu re- différentielles de chacun des secteurs et
- grandeur statistique du &2 convient pour mesu- chi; intermédiaires des présentées (cas Alpes rer la distance qui sépare 2 lignes ou 2 co- et dans celles où les forêts sont rares Ouest) ou lonnes : 2 relevés ou 2 espèces. Le programme (cas des Alpes internes Ouest). En absentes de l’ADDAD* (Fénélon, 1982), que nous avons est re- définitive, chaque entité biogéographique utilisé, procède par l’agrégation successive présentée par le nombre de relevés suivants : d’éléments qui sont les plus proches. On obtient Alpes externes : 59; Alpes intermédiaires ainsi une arborescence graphique. La classifica- Ouest : 77; Alpes intermédiaires Est : 72; Alpes tion part d’éléments parfaitement individualisés internes Ouest : 23; Alpes internes Est : 43. et finit par les rassembler tous. En effectuant Les disproportions qui existent entre ces des coupures dans l’arborescence, on individua- chiffres sont donc le reflet de la variabilité des lise des classes pertinentes et on établit des cor- surfaces occupées par les sapinières dans cha- respondances avec la représentation fournie par que zone (fig 2). l’AFC. Chaque relevé est accompagné d’informa- tions topographiques et géographiques : alti- tude, pente, exposition, type d’humus, roche- Information mutuelle mère, coordonnées Lambert III. profil écologique indicé et Les 2 méthodes d’analyse multidimensionnelle Traitement des données ont conduit à une première classification des re- levés et des espèces. Le but principal de notre les modifications du étude étant de quantifier Analyse factorielle sein des sapinières d’ouest végétal couvert au en est, nous avons effectué une troisième ana- des correspondances lyse statistique à l’aide de la méthode de l’infor- mation mutuelle. Cette dernière avait pour objet L’AFC porte sur une table de contingence, c’est- de préciser la répartition quantitative des princi- à-dire un tableau rectangulaire de nombres dont pales espèces herbacées et ligneuses le long les sommes ont un sens tant en lignes qu’en co- du transect. lonnes. Dans notre cas, les 2 entrées en sont, respectivement, les espèces végétales et les re- L’information mutuelle est une méthode sta- levés de végétation. Chaque élément du ta- tistique analytique qui permet d’étudier l’attrac- bleau à étudier n’est autre que la proportion tion des espèces vis-à-vis d’une variable écolo- moyenne du recouvrement d’une espèce dans gique (Daget et al, 1972). Elle traite une table un relevé effectué selon la méthode définie par de contingence qui croise les espèces avec les Braun-Blanquet. modalités de la variable considérée. Un relevé est représenté par 1 point dans un L’information mutuelle est faible lorsqu’une espace comprenant autant de dimensions que espèce est presque toujours présente ou pres- d’espèces. L’AFC met en évidence des direc- que toujours absente, quelles que soient les mo- tions privilégiées de cet espace. Par projection dalités adoptées par la variable. Elle est au sur les plans qu’elles définissent, on obtient une contraire élevée lorsqu’elle manifeste une préfé- représentation du nuage de points originels. La rence ou une répulsion pour certaines modalités méthode permet de représenter également les de la variable. Il est ainsi possible d’individuali- projections des espèces. ser les espèces dont l’écologie est bien affir- mée. Le profil écologique indicé de chaque espèce Classification ascendante hiérarchique complète les apports de l’information mutuelle en testant leurs sensibilités respectives à cha- cune des modalités de la variable écologique On remarquera que, dans la table de contin- (Gauthier et al, 1977). L’inconvénient de cette gence, les lignes comme les colonnes représen- méthode réside dans le fait que seul le carac- tent des histogrammes de fréquences relatives tère présence-absence est pris en considération correspondant à des modalités qualitatives. La Char- ADDAD : Association pour le développement et la diffusion de l’analyse des données, 22, rue * cot, 75013 Paris, France
- prétation phytoécologique car les espèces et non plus les abondances comme dans l’AFC s’y disposent selon un étalement maximum et la CAH. Nous avons utilisé les programmes mis au point par le CEPE**. Nous n’avons rete- et font apparaître des gradients significa- nu que les 130 espèces les mieux représentées tifs. sur le transect. Certaines espèces typiquement Les 4 premiers axes expliquent 13% de externes mais ne figurant que dans quelques la variation totale; cette valeur est faible relevés ont été exclues. mais courante dans les études phytoécolo- La validité de ce choix a été testée par une nouvelle AFC qui a porté sur les 274 relevés et giques (Lacoste, 1972). les 130 espèces considérées (tableau II). 1 Axe répartit les espèces selon Cet un gra- RÉSULTATS axe dient, reflet du niveau d’activité biologique espèces les mieux corré- de l’humus. Les lées positivement le long de cet axe sont : Commentaire des plans factoriels Acer pseudoplatanus, Adenostyles allia- (fig 3 et 4) riae, Cicerbita alpina, Galium odoratum; toutes, sauf la dernière, sont des mésohy- Nous nous bornerons à la description du grophiles de mull. plan 1-2 qui se prête le mieux à une inter-
- dividualisent : Abies alba, Fagus sylvatica, Du côté négatif figurent : Melampyrum Galium odoratum, Festuca sylvatica. sylvaticum, Vaccinium myrtillus, V vitis- idaea, Homogyne alpina, Festuca flaves- cens; il s’agit là d’espèces mésophiles de Axe 3 moder. Les espèces sont distribuées selon une Axe 2 orientation à peu près nord-sud, opposant les espèces des Préalpes du Nord, scia- Les espèces se distribuent selon un gra- philes et plus ou moins acidophiles du dient altitudinal assez net. montagnard aux espèces héliophiles les Du côté positif figurent : Larix decidua, plus méridionales et caractéristiques de Viola biflora, Picea abies, Rumex arifolius, milieux plus ouverts. Adenostyles alliariae. Du côté négatif s’in-
- Axe 4 climat frais et bien arrosé. C’est la un grande diversité des substrats depuis les calcaires durs urgoniens jusqu’aux amphi- L’axe 4 oppose les espèces caractéristi- bolites qui explique le grand nombre de ques des sapinières typiques à celles qui groupements décrits (Bartoli, 1962; Faure, sont les plus éloignées de la sapinière 1968; Ferrand, 1984). sensu stricto et qui s’épanouissent dans les groupements de basse altitude. Les relevés appartenant aux Alpes ex- Les résultats de la CAH Alpes intermédiaires sont ternes et aux (tableau I et fig 5) dispersés dans l’ensemble du plan; ce type de distribution s’explique par la très grande diversité des groupements se rattachant Deux grandes unités apparaissent, d’une au complexe de la hêtraie-sapinière sous part les hêtraies-sapinières qui rassem-
- blent les groupements forestiers des Alpes doute la raison qui explique la c’est sans externes et intermédiaires ouest, et d’autre peu particulière de ce groupe- position un part, les sapinières-pessières des Alpes in- ment. Le caractère transitoire de la pes- termédiaires orientales et des Alpes in- sière à noisetier se retrouve dans la posi- ternes. Chacune de ces 2 grandes unités tion qu’elle occupe sur le graphique; elle est subdivisée en groupements floristique- situe à proximité des hêtraies- se ment, écologiquement et biogéographique- sapinières avec lesquelles elle partage ment définis (tableau I). Une troisième fraîcheur et richesse chimique du sol unité comprend les groupements à hautes (Oberlinkels, 1987). herbes (niveauxIà IV) riches en espèces mésohygrophiles de mull (mégaphor- Direction c biaies). Les groupements uniquement présents sur Direction a calcaire s’ordonnent le long de cette direc- tion : hêtraies-sapinières calciphiles des Les groupements riches espèces méso- en zones externe et intermédiaire occiden- hygrophiles de mull se distribuent le long tales, sapinière-pessière à Calamagrostis d’un gradient altitudinal. Ce sont les grou- varia et à Veronica urticifolia du sous- pements présents depuis les Alpes ex- secteur intermédiaire occidental, pessière- (érablaie à hêtre, pessière à Athy- ternes sapinière à Aster bellidiastrum du sous- rium filix-femina) jusqu’aux Alpes internes secteur intermédiaire oriental (Pautou et occidentales (sapinière-pessière et mélé- al, 1986). La sapinière-pessière à Melam- zein à Adenostyles alliariae). Le sous- pyrum sylvaticum et à Carex australpina secteur interne est ne présente pas ce caractéristique du sous-secteur interne type de groupements au sein des sapi- oriental, sur calcaire, s’apparente beau- nières. coup plus à la sapinière à Melampyrum sylvaticum et à Saxifraga cuneifolia sur roche mère acide du même sous-secteur Direction b plutôt qu’à la sapinière-pessière calciphile à Aster bellidiastrum précitée. Dans le Elle met lumière le passage des hê- en Briançonnais, les sapinières ont une com- traies-sapinières riches en hêtre aux pes- position floristique très particulière où do- sières pures par l’intermédiaire des sapi- minent les espèces acidophiles de moder nières des et sapinières-pessières. à peine désaturé; la différence de substrat Méritent une mention particulière les sapi- se traduit par l’absence ou la présence de nières caractéristiques des Alpes intermé- quelques calciphiles, dont Carex australpi- diaires orientales comme celle du Fournel na est la plus caractéristique. (Briançonnais occidental) (Meyer, 1981) des Alpes internes occidentales comme L’AFC et la CAH individualisent de ou celle de Marassan (Queyras oriental) dans façon très nette des relevés des Alpes in- lesquelles le hêtre et l’épicéa sont absents, ternes. En revanche, les relevés apparte- mais où le mélèze est fréquent. La sapi- nant aux Alpes externes et aux Alpes inter- nière de Marassan à Festuca flavescens et médiaires sont dispersés sur l’ensemble Lathyrus vernus est située sur schistes lus- du plan. Le tableau II, construit à partir de trés où quelques espèces calciphiles l’information mutuelle, permet d’aller au- comme Aster bellidiastrum sont présentes; delà d’une partition en deux entités.
- forte attraction des pôles extrêmes par des Apport de l’information mutuelle et causes de type chorologique (origine des analyse des profils écologiques indicés taxons) et de type écologique (caractéristi- (tableau II et fig 6) ques climatiques affirmées). Cinq espèces sont attirées par les ni- Le tableau met en lumière de façon très veauxI et II dont 2 de façon très significa- qu’un fort contingent d’espèces est nette tive; c’est le cas de Fagus sylvatica. Par un attiré par les conditions écologiques des même effet de symétrie, 5 espèces sont qui occupent une position margi- secteurs attirées par les niveaux V et IV, dont 2 nale; ainsi, 16 espèces présentent une façon très nette; c’est le cas de Festuca forte attirance pour le niveau I, dont 13 de flavescens, espèce qui présente un fort re- 18 espèces pré- façon très significative; couvrement dans la partie occidentale des sentent une forte attirance pour le niveau Alpes internes. La distribution de ces V, dont 14 de façon très significative (de groupes d’espèces semble être régie par 63 jusqu’à 75). On peut expliquer cette
- les mêmes que dans le des gie affirmée. Deux cas particuliers sont à causes cas ca- tégories précédentes, mais il s’agit d’es- signaler : celui des espèces attirées par les niveaux III et IV, c’est-à-dire trouvant pèces ayant une plus grande amplitude leur optimum au niveau de l’écotone Alpes écologique. Le nombre d’espèces attirées de façon intermédiaires-Alpes internes; celui des es- significative par les niveaux médians est pèces à répartition discontinue, qui sont le nettement plus bas : 4 par le niveau II reflet de caractéristiques pédologiques très (dont Abies alba), 6 par le niveau III, 1 par marquées; ainsi, le groupe des espèces le niveau IV. Le fait qu’il n’y ait pas d’es- acidophiles strictes comme Vaccinium myr- pèces attirées de façon significative par les tillus. La répartition de cette espèce qui est niveaux II et III montre que les Alpes inter- attirée par les 2 niveaux extrêmes est ré- médiaires constituent vélateur d’un phénomène de discontinuité interface entre 2 une contingents floristiques orientaux et occi- induit par la nature du substrat, au sein de dentaux comportant des espèces à écolo- la variation progressive d’ordre climatique
- 1984; Ozenda, 1985). Certes, il existe des d’ouest en est. En zone externe, la myrtille différences très nettes entre les massifs est bien représentée sur les schistes cris- préalpins calcaires et la chaîne de Belle- tallins de Belledonne et sur le calcaire ur- donne où dominent les amphibolites mais, gonien de Chartreuse ici recourvert contrairement à ce que l’on pourrait croire, d’humus brut. Dans la partie orientale des les différences de nature chimique de la Alpes internes, l’altitude élevée et la fré- roche mère n’ont pas d’influence sur quence des moder favorisent également l’abondance des espèces acidophiles. Sur cette espèce. Par contre, les sols de la les massifs calcaires (urgonien), il y a for- zone intermédiaire essentiellement formés mation d’un humus brut très acide; il n’est sur amphibolite, sur schiste ou sur calcaire pas étonnant qu’un grand nombre d’acido- marneux, présentent une forte activité bio- philes se rencontrent à la fois en Char- logique et constituent donc un obstacle treuse, en Vercors sur calcaire et dans les pour une espèce acidophile. massifs cristallins. Par contre la granulo- Les espèces figurant en fin de tableau métrie des sols obtenus à partir de la dé- présentent une répartition biogéographi- composition des roches mères est à l’ori- hétérogène, bien qu’étant globable- que gine d’une capacité hydrique très variable. ment plus attirées par le niveau V (Alpes Dans les massifs siliceux, l’altération des internes orientales). II s’agit là, pour la plu- amphibolites conduit à la formation de sols part, d’espèces acidoclines et acidophiles riches en éléments fins et en colloïdes ar- fréquentes dans toutes les sapinières d’al- gileux : les espèces mésohygrophiles des titude du sous-secteur interne oriental. mégaphorbiaies sont nombreuses et ont un fort recouvrement. En revanche, les cal- caires des Préalpes sont à l’origine de sols DISCUSSION pauvres en argiles, plus filtrants d’où une diminution des espèces ayant des besoins analyses statistiques portant sur les en eaux élevés. Les groupements ou sur les espèces souli- gnent la forte individualisation des niveaux Alpes intermédiaires extrêmes. Les analyses statistiques confirment que les Alpes intermédiaires constituent une Caractéristiques des différents cellule charnière, une plaque tournante qui secteurs phytogéographiques accueille des peuplements aussi bien d’ori- gine occidentale que d’origine orientale mais souvent appauvris en leurs éléments Alpes externes les plus représentatifs. Les peuplements appartenant aux trois ensembles individua- Le secteur constitue une entité homogène lisés par la CAH y sont représentés mais à le plan phytogéographique et sociolo- sur la faveur de situations écologiques diffé- gique. Ce n’est pas étonnant quand on rentes (phénomène de juxtaposition). constate que le total des précipitations Cette organisation en mosaïque s’expli- varie faiblement depuis les massifs préal- que par l’existence de discontinuités pins jusqu’à la crête de Belledonne. La val- d’ordre édaphique, topographique ou oro- lée du Grésivaudan ne peut être retenue graphique. La diminution considérable des comme limite entre Alpes externes et précipitations d’ouest en est (environ 100 Pautou, et Alpes intermédiaires (Cadel
- riations locales des conditions du milieu. mm par 10 km) est atténuée par des fac- Deux types principaux de sapinières sont teurs de compensation d’origine édaphique représentés sur calcaire, la sapinière- et aggravée par l’existence de contraintes pessière à Calamagrostis varia et la sapi- le de l’économie de stationnelles plan sur nière-pessière à Aster bellidiastrum (Pau- l’eau, susceptibles d’annihiler les change- climatique (diminution de al, 1986; Oberlinkels, 1987); ments d’ordre tou et précipitations). la présence de calcaires marneux dans - le bassin de Bourg d’Oisans favorise, tout Les conséquences sur le plan de la cho- autant que la diminution des précipitations, rologie sont nombreuses : l’épanouissement du pin sylvestre et le groupements à hêtre dominant (sapin les - maintien de hêtraies-pinèdes stables, rares ou absents) parviennent à épicéa et groupements qui ont à la fois un détermi- la limite orientale des Alpes intermédiaires nisme climatique et édaphique (Pautou et (Vénéon) à la faveur de sols superficiels al, 1986); dans les stations à exposition est ou ouest. la vigueur de l’activité érosive en Oisans En revanche, des sapinières-pessières - provoque la dénudation de sites sur de sont présentes dès l’entrée des Alpes in- vastes superficies; ces sites sont alors très termédiaires sur des roches mères très favorables au mélèze. Ces conditions ainsi acides conduisant à la formation d’humus que les interventions humaines (reboise- de type moder; ments) semblent plus à l’origine de la pro- sapinières se rencontrent depuis le les - gression des populations de mélèze que montagnard moyen jusqu’au subalpin infé- les changements d’origine climatique; rieur; à ce niveau, sapin et épicéa peuvent la présence de roches mères conduisant coexister dans des groupements mixtes. - à la formation de sols à forte activité biolo- Suivant les régions, l’une ou l’autre des 2 gique et à bonne rétention hydrique (am- espèces peut être absente. Ainsi, dans le phibolites, calcaires marneux), l’existence bas Vénéon, le sapin est rare et c’est l’épi- de névés, expliquent la forte représenta- céa qui occupe la totalité des ubacs entre tion des peuplements à hautes herbes et 1 000 et 1 800 m (Tonnel et Ozenda, des espèces de mull et d’hydromull dans 1964; Oberlinkels, 1983); la composition les Alpes intermédiaires. Le passage du floristique de ces forêts est trèc compa- sous-secteur occidental au sous-secteur rable à celle que l’on rencontre dans les oriental se manifeste par une diminution sapinières-pessières du Valjouffrey (fig 1). sensible des représentants des Fagetalia Plus au sud, le Valgaudemar, où l’épicéa sylvaticae parallèlement à l’apparition d’es- est quasi absent, présente des sapinières pèces telles que Festuca flavescens, Larix pures dont la composition floristique s’ap- decidua, Carex australpina; en outre, Cala- parente fortement à celle du Valjouffrey magrostis varia, présente dans le sous- (Oberlinkels, 1987). Ainsi, dans les Alpes secteur oriental une extension maximale intermédiaires, l’individualisation d’une (Oberlinkels, 1987) alors que dans la zone série de la sapinière-pessière s’impose externe, il préfère le couvert modéré des (Pautou et al, 1986). Mais il s’agit, en fait, pinèdes; cette forte extension peut être d’une unité compréhensive qui existe sous plusieurs types physionomiques. Cette hé- également reliée à l’abondance des cal- caires liasiques. L’Abietetum albae festu- térogénéité est le reflet de l’histoire post- cetosum (Kuoch, 1954) bien représenté glaciaire (arrivée récente de Picea abies dans les Alpes intermédiaires occidentales depuis 1 000 ans en Oisans) (Coûteaux, laisse la place à l’Abietetum albae melam- 1981),des sylvicultures passées et des va-
- Mayer, 1977) l’Engadine suisse (Braun- pyretosum dans les Alpes intermédiaires Blanquet et al, 1954) et la Maurienne fran- orientales. En fait, les espèces qui ont un çaise (Bartoli, 1966; Fournier et Peltier, fort recouvrement dans la zone intermé- 1987) s’en rapprochent. diaire semblent répondre plus à des exi- Dans les Alpes internes orientales, le gences d’ordre édaphique (Calamagrostis varia, Adenostyles glabra sur calcaire mar- climat beaucoup plus sec limite l’extension des sapinières et des pessières qui se lo- neux notamment), qu’à des exigences cli- calisent presque exclusivement dans le matiques. subalpin inférieur (Cadel, 1980); ce confi- nement dans un créneau altitudinal nette- Alpes internes ment plus élevé que dans les massifs péri- phériques tend à atténuer les différences liées au substrat. Il en résulte une grande La partition des Alpes internes en 2 entités homogénéité des sapinières et des pes- est corroborée par tous les tests statisti- sières; elles n’occupent qu’une surface ré- à Festuca flavescens pessières ques. Les duite par rapport aux autres formations fo- Saxifragra cuneifolia qui s’implantent et restières du même niveau (mélézeins et les fortes pentes schisteuses et sili- sur pinèdes). du Vénéon (Oberlinkels, 1983) et ceuses les mélézeins à mégaphorbiaie sur les Si le sapin et l’épicéa occupent des alti- sols profonds de la Haute Romanche sont tudes plus élevées dans les Alpes internes représentatifs du sous-secteur occidental Alpes externes, leur compor- que dans les (niveau IV). Les sapinières à Festuca fla- tement n’est pas le même dans les 2 sous- vescens et Lathyrus vernus situées sur les secteurs. schistes lustrés du Queyras oriental sont Dans les Alpes internes occidentales, aussi à rattacher au niveau IV. Il est inté- les forêts du montagnard et du subalpin in- ressant de remarquer que la partie la plus férieur d’ubac occupent de vastes surfaces à l’est des Alpes françaises est plus hu- mais présentent des différences physiono- mide que le Briançonnais ou le Queyras miques très marquées. Dans la vallée du occidental : cela est dû à l’influence des Vénéon, la pessière subalpine atteint 1 conditions climatiques règnant sur les 850 m; la strate arborescente est mono- Alpes italiennes toute proches. Dès que spécifique (Oberlinkels, 1983). Dans la l’on passe la frontière, la pluviosité aug- haute Romanche, seul le mélèze est pré- mente très rapidement et l’on ne tarde pas sent; sapins et épicéas sont absents. Dans à rencontrer à nouveau, le hêtre. le haut Queyras, le sapin règne en maître Le sous-secteur oriental s’individualise et s’élève jusqu’à 1 900 m. négativement par l’absence des peuple- Dans les Alpes internes est (Briançon- ments indiqués pour les Alpes internes oc- nais en grande partie, Queyras calcaire) la cidentales et positivement par l’extension situation est autre. La grande xéricité cli- massive des pinèdes sylvestres (Onobry- matique et plus encore édaphique induit chideto-Pinetum, Ononido-Pinetum, Des- un comportement différent des 2 es- champsio-Pinetum) (Braun-Blanquet, 1961) sences. Le sapin se localise entre 1 600 et pinèdes à crochets. Il constitue le et des 1 900 m; il est donc presque entièrement noyau le plus xérique qui n’a pas d’équiva- exclu de l’étage montagnard et se réfugie lent dans tout l’arc alpin même si des ré- dans le subalpin inférieur. Dans cette gions comme le Vinschgau italien (Karner tranche altitudinale, grâce à un enracine- et al, 1973; Florineth, 1974) l’Ötztal autri- ment profond, il trouve une alimentation en chien (Schiechtl, 1970; Wagner, 1971;
- suffisante. Les effectifs devraient aug- eau prenant compte que les 2 résineux ne en menter au cours des prochaines décen- (Oberlinkels, 1987). Les données ont été nies, dans la mesure où l’homme ne favo- fournies par l’ONF. Une critique fondamen- rise plus le mélèze (Cadel, 1980). Quant à tale de cette approche comparative réside l’épicéa, sa place est réduite (Cadel et dans le fait que la valeur de la productivité Gilot, 1963), contrairement à ce qu’on obs- n’est pas assortie d’une évaluation de la erve dans les Alpes internes fertilité stationnelle. Néanmoins, on peut septentrio- nales (Gensac, 1970; Ozenda et Wagner, tirer quelques enseignements. La producti- 1975) qu’elles soient françaises (Gensac, vité diminue de façon régulière d’ouest en 1967), suisses (Bach et al, 1954; Eilenberg est (fig 7). Dans les Alpes externes, elle Klotzli, 1972) et autrichiennes (Wagner, ou est toujours supérieure à 4m et ·an -1 ·ha 3 1971; Mayer, 1974). Cette faible représen- peut atteindre 7,5 m Cette grande ampli- . 3 tation estplus due à une impossibilité éco- tude montre le poids des conditions sta- logique qu’à une absence chorologique. tionnelles. Dans la vallée de la Clarée où sapin et épi- Dans les Alpes intermédiaires, les va- céa coexistent, ce dernier n’arrive jamais à leurs rendent compte des conditions écolo- concurrencer le sapin; il ne forme une pes- giques moins favorables que dans les sière pure qu’au-dessus de la limite thermi- massifs externes mais nettement moins que de la sapinière (Cadel, 1976). A cause sévères que dans le secteur intra-alpin. de son enracinement superficiel, l’épicéa Les différences sensibles entre sous- est donc moins apte que le sapin à trouver secteur occidental et sous-secteur oriental des stations refuges où l’alimentation hy- justifient une individualisation qui, comme drique en profondeur soit suffisante. Dans nous l’avons vu, est moins évidente sur la les Alpes internes est du Dauphiné (Brian- base de critères sociologiques. Dans les çonnais et Queyras), quelques pessières conditions les plus défavorables du sous- dépérissantes se localisent entre 1 850 et 2 000 Ces observations concernant le m. comportement de 2 essences ma- ces jeures également vont dans le d’une sens individualisation des 2 sous-secteurs. La productivité des sapinières et des sapinières-pessières dans les 5 entités phytogéographiques On peut demander si la partition des se Alpes dauphinoises en 5 entités phytogéo- graphiques, effectuée à partir de critères floristiques et sociologiques peut être va l dée prenant des critères de fonctionne- en ment. Nous prendrons descripteur comme la production brute par hectare et par an, telle qu’elle est évaluée par l’Office natio- nal des forêts. Elle a été calculée pour les sapinières et les sapinières-pessières en
- de type Abietetum albae et l’épa- pessière secteur oriental de ces Alpes intermé- nouissement de hêtraies-pinèdes, de pi- diaires la productivité se rapproche des nèdes et même de pinèdes-pessières valeurs caractérisant les Alpes internes. al, 1986) justifient l’individuali- et (Pautou On soulignera les chiffres très faibles pour Oisans d’un secteur des Alpes sation en les sapinières du sous-secteur interne est intermédiaires. La différenciation de 2 moyenne). Ces (2,5 m ·an -1 ·ha 3 en sous-secteurs est plus délicate; cepen- s’appliquent qu’aux chiffres modestes ne dant, dans le sous-secteur occidental, les Dans l’environnement climati- sapinières. hêtraies dominent dans le montagnard Briançonnais, des essences que du d’ubac sur calcaire alors que dans le sous- pin à crochet ou le mélèze sont comme le secteur oriental ce sont les pinèdes et les beaucoup plus performantes. pessières. Les discontinuités de type édaphique que l’on observe depuis la Chartreuse CONCLUSION jusqu’au Briançonnais peuvent compliquer l’interprétation phytogéographique que l’on L’analyse statistique que nous avons en se basant sur la distribution peut faire menée montre qu’il est plus facile d’établir des différents taxons. Les facteurs édaphi- des limites dans les régions marginales où ques peuvent avoir des effets antagonistes les paramètres écologiques passent par sur la distribution des groupements végé- des valeurs extrêmes. Ainsi, en testant l’af- taux. Ils peuvent avoir un effet homogénéi- finité biogéographique des espèces choi- sateur en permettant l’implantation de sies, l’information mutuelle fait apparaître de peuplements voisins dans des si- types une partition en deux groupes principaux climatiques différentes : pinèdes tuations de taxons : ceux qui sont attirés par la mésophiles sur calcaire. Le cas des méga- zone externe et repoussent fortement la phorbiaies est intéressant. C’est dans les Alpes intermédiaires qu’elles occupent les qui ont un comporte- interne et ceux zone plus vastes surfaces. Elles sont rares dans Alpes intermédiaires ment inverse. Les la partie calcaire des Alpes externes mal- constituent une zone de transition où seul gré la très forte pluviosité. Dans le Brian- un petit nombre d’espèces trouvent des çonnais, c’est la conjonction de facteurs conditions optimales. II est donc difficile, climatiques (précipitations faibles) et de au seul examen des profils indicés, de jus- facteurs édaphiques (sols filtrants sur cal- tifier le découpage des Alpes dauphi- caire ou sur quartzite) qui explique leur to- noises en 5 niveaux. Si on prend en tale disparition. compte des critères de type sociologique, des arguments peuvent être trouvés pour La présence de calcaires durs, pauvres en argile, empêchant la formation d’un valider ce découpage. complexe argilo-humique, favorise inverse- La présence de forêts mésophiles de ment la genèse d’un humus peu actif de Carpinus betulus, de forêts de bois durs type moder calcique et on peut observer Querco-Ulmetum), et (Pruno-Fraxinetum une forte représentation des plantes de de hêtraies très richement pourvues en re- moder aux 2 extrémités du transect. C’est présentants des Fagetalia (Asperulo- le cas dans les Préalpes sur les calcaires Fagetum, Cardamino-Fagetum, Fagetum urgoniens et dans le Briançonnais sur les sylvaticae) caractérisent les Alpes ex- calcaires triasiques. ternes. Depuis les Alpes externes jusqu’aux disparition de ces groupements mais La Alpes internes, sapinières et pessières l’implantation de la sapinière- aussi
- progressent en altitude plus que les étages drae (Braun-Blanquet, 1961),de mélé- de végétation (300 m au lieu de 150). Une zeins à mégaphorbiaies et de pessières des conséquences est que les espèces subalpines montre les affinités entre ce d’affinité subalpine sont donc plus fré- que nous appelons les Alpes internes occi- quentes dans les sapinières et les pes- dentales et d’autre part les Alpes internes sières internes que dans leurs homologues autrichiennes et suisses. Quelques pro- externes; nous citerons Rhododendron fer- blèmes demeurent dans ce sous-secteur rugineum, Homogyne alpina, Soldanella al- ouest : pourquoi l’épicéa si abondant dans pina, Pinus uncinata. la vallée du Vénéon est-il absent de la val- lée de la Romanche à l’amont du barrage S’il existe des possibilités d’installation du Chambon et inversement pour le mé- de la sapinière tout au long du transect lèze ? Est-ce le reflet de voies de migra- dauphinois, les biotopes favorables de- tions non achevées ou y-a-t-il d’autres ex- viennent très localisés au fur et à mesure plications ? que les précipitations diminuent. Dans le Briançonnais, la sapinière n’est possible que dans des limites d’altitude, d’exposi- tion, d’alimentation hydrique du sol très RÉFÉRENCES étroites. En passant des Alpes externes aux Alpes internes, la signification de la sapinière comme climax climatique dimi- Bach R, Kuoch R, Iberg R (1954) Wälder der nue. Alors que dans la région grenobloise Schweizer Alpen im Verbreitungsgebiet der la sapinière peut occuper tous les ubacs Weisztanne. Entscheidende Standorstsfakto- entre 800 et 1 600 m, dans le Briançonnais ren und Böden. Mitt Schweiz Anst Forst Vers elle est localisée dans une faible tranche 30, 261-314 altitudinale entre 1 600 et 1 900 m et sur Bartoli C (1962) Premières notes sur les asso- ciations forestières du massif de la Grande les versants s’écartant très peu du plein Chartreuse. Ann Ecole Nat Eaux For 19, nord. 357-377 Dans les Alpes intermédiaires, quelques Bartoli C (1966) Études écologiques sur les as- énigmes restent à élucider. C’est le cas sociations forestières de la Haute-Maurienne. des hêtraies, qui à 10 km de leur limite Ann Sci For 23, 433-751 orientale constituent, dans le bas Vénéon Braun-Blanquet J (1961) Die inneralpine Troc- et dans le Valgaudemar sur des adrets kenvegetation. G Fischer, Stuttgart acides, des peuplements purs alors Braun-Blanquet J, Pallmann H, Bach R (1954) qu’elles sont sporadiques voire absentes Vegetation und Böden der Wald- und dans les ubacs; peut-on expliquer cette ab- Zwergstranchgesellschaften (Vaccinio-Picee- talia). In: Résultats des recherches scientifi- sence comme une conséquence des inter- ques entreprises au Parc National Suisse IV, ventions humaines ? 1-198 La totale du hêtre dans les disparition Cadel G (1976) La Névachie : son intérêt botani- Alpes internes et l’implantation massive du que. Rapport pour le Parc National des mélèze représentent 2 caractéristiques Ecrins, 16 p, 1 carte majeures de cette zone. La différenciation Cadel G (1980) Séries de végétation et sols du entre un sous-secteur occidental et un Subalpin briançonnais sur roches-mères sili- sous-secteur oriental est nettement plus coalumineuses. Comparaison avec la Mau- fondée que pour les Alpes intermédiaires. rienne et la Tarentaise. Sci Sol 4, 249-264 La présence du Piceetum montanum, du Cadel G, Gilot JC (1963) Feuille de Briançon Corylo-Populetum, du Salicetum pentan- (XXXV-36). Doc Carte Vég Alpes 1, 91-139
- types de pessières. Rev Gén Bot 74, rents Cadel G, Pautou G (1984) Les groupements fo- 425-528 restiers des Alpes intermédiaires dauphi- particularités biogéographiques, (1970) Les pessières de Tarentaise noises : Gensac P phytosociologiques et écologiques. Colloque comparées aux autres Pessières alpestres. Ecologie des milieux montagnards et de Ber Geobot Inst Eidg Tech Hochsch Stif Rue- haute altitude. Doc d’Ecol pyrénéenne III-IV, bel Zuer 43, 104-139 21-27 Gillot P (1981) Le montagnard et le subalpin (1981) Caractérisation pollenanaly- Coûteaux M d’adret dans les Alpes intermédiaires dauphi- Oisans des milieux forestiers et des noises. Mémoire de DEA d’Écologie appli- tique en milieux supraforestiers dans l’état actuel et quée, Grenoble, 133 p dans le passé. CR colloque, La limite supé- Karner A, Kral F, Mayer H (1973) Das inneral- rieure de la forêt et sa valeur de seuil. Perpi- pine Vorkommen der Tanne im Vinschgau. gnan, 139-158 Zentralblat Gesamte Forstwes 90, 129-163 Daget P, Godron M, Guillerm JL (1972) Profils Kuoch R (1954) Wälder der Schweizer Alpen im écologiques et information mutuelle entre es- Verbreitungsgebiet der Weisstanne. Ann Inst pèces et facteurs écologiques. Actes du Fed Rech For 30, 131-260 Symp Int Grunfugen und Methoden in der Lacoste A (1972) La végétation de l’étage subal- Pflanzensoziologie Rinteln, 1970, 121-149 pin du bassin supérieur de la Tinée (Alpes Duchaufour P, Fourchy P (1952) Étude sur Maritimes). Applications de l’analyse multidi- l’écologie et la sylviculture du mélèze. Pédo- mensionnelle aux données floristiques et logie et facteur biotiques. Ann ENEF, XIII, écologiques. Thèse Paris-Orsay, 295 p 139-195 Mayer H (1963) Tannenseich Wälder am Nor- Ellenberg G, Klotzli F (1972) Waldgesellschaf- dabfall der mitteeren Ostalpen. BLV, Munich, ten und Waldsthandorte der Schweiz. Mém 208 p Inst Suisse Rech For 48, 589-930 Mayer H (1974) Wälder des Ostalpenraumes. Faure C (1968) Feuille de Vif (XXXII-35). Doc Fischer, Stuttgart, 344 p Carte Vég Alpes, VI, 7-69 Mayer H (1977) Waldbauliche Untersuchungen Fénélon JP (1982) Qu’est-ce que l’analyse des in Lärchen-Zirbenwäldern der Ötztaler Alpen. données. Lefonen, Paris, 311 p Zentralbl Gesamte Forstwes Wien 94, 11-32 Ferrand T (1984) Étude d’une séquence biocli- Meyer D (1981) La végétation des vallées de amphibolites : matique (sol, végétation) sur Vallouise, du Fournel et de la Biaysse (Pel- Massif de Belledonne, Taillefer. Mémoire de voux oriental, Haute-Alpes). Analyse phyto- DEA Biol Physiol Pédo Nancy et USMG, sociologique et phytogéographique des 88 p étages collinéen, montagnard et subalpin. Florineth F (1974) Vegetation und Böden des Thèse 3 cycle Univ Aix-Marseille I, 176 p e oberen Vinschgaues (Südtirol, Italien); Ber Oberlinkels M (1983) Les groupements fores- Naturwiss Med Ver Innsb 61, 43-70 Bourg d’Oisans à St- de d’ubac tiers Fournier J, Peltier JP (1987) Les secteurs bio- Oisans; contribution à l’étude Christophe en géographiques de la Maurienne (Savoie) : d’un transect dans les Alpes dauphinoises. leur délimitation par l’étude des précipitations Mém DEA Ecol Appl USMG, 36 p et des groupements végétaux forestiers. Doc Oberlinkels M (1987) Étude phytoécologique Cart Ecol XXX, 3-24 des vallées occidentales du massif des Gauthier B, Godron M, Herniaux P, Lepart J Ecrins. Thèse Univ Grenoble, 123 p (1977) Un type complémentaire de profil éco- logique : le profil écologique indicé. Can J Ozenda P (1966) Perspectives nouvelles dans l’étude phytogéographique des Alpes du Bot 2859-2865 Sud. Doc Carte Vég Alpes, VI:1-198, 3 cartes Gensac P (1967) Les forêts d’Epicéa de Moyenne Tarentaise. Recherche des diffé- coul
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