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Báo cáo khoa học: " Croissance de l’épicéa, du mélèze, du pin cembro et du pin à crochets en limite supérieure de la forêt dans quatre régions des Alpes françaises"

Chia sẻ: Nguyễn Minh Thắng | Ngày: | Loại File: PDF | Số trang:15

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Tuyển tập các báo cáo nghiên cứu về lâm nghiệp được đăng trên tạp chí lâm nghiệp quốc tế đề tài: " Croissance de l’épicéa, du mélèze, du pin cembro et du pin à crochets en limite supérieure de la forêt dans quatre régions des Alpes françaises...

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Nội dung Text: Báo cáo khoa học: " Croissance de l’épicéa, du mélèze, du pin cembro et du pin à crochets en limite supérieure de la forêt dans quatre régions des Alpes françaises"

  1. Article original Croissance de l’épicéa, du mélèze, du pin cembro et du pin à crochets en limite supérieure de la forêt dans quatre régions des Alpes françaises V Petitcolas’ C Rolland, R Michalet Laboratoire des écosystèmes alpins, Centre de biologie alpine, université Joseph-Fourier, BP 53 X, 38041 Grenoble cedex 9, France le 10 février 1997 ; accepté le 3 juin 1997) (Reçu Summary — Tree-growth of spruce, larch, arolla pine and mountain pine near the timberline in four french alpine areas. The radial growth and the dominant height of the Norway spruce, the European larch, the arolla pine and the mountain pine growing near the timberline are analysed in four located in the French Alps (Briançonnais, Haute-Maurienne, Moyenne-Tarentaise and Belle- areas on two exposures (northern and southern slopes) and two kinds of bedrock (calcareaous and donne), non-calcareaous). The radial growth is globally higher in the Moyenne-Tarentaise, and lower in the Briançonnais. The radial growth of the spruce and the arolla pine is relatively high, particularly on non- calcareous bedrocks and southern slopes, whereas that of the mountain pine and the larch is lower and less dependant on stational conditions. The rhythms of growth expressed in basal area increment also differ, with a more extended period of high growth rate for the arolla pine compared to the spruce, a very slow decline of the ring areas of the mountain pine after 75 years and the stabilisation of those of the larch between at least 75 and 350 years. Finally, the spruce and the larch show the best dominant heights. Norway spruce / European larch / arolla pine / mountain pine / growth / subalpine Résumé — La croissance radiale et la hauteur dominante de l’épicéa, du pin cembro, du mélèze et du pin à crochets poussant en limite supérieure de la forêt ont été étudiées dans quatre régions biocli- matiques des Alpes françaises (Briançonnais, Haute-Maurienne, Moyenne-Tarentaise et Belledonne), dans deux expositions (adret et ubac) et sur deux types de roche-mère (calcaires et non carbona- tées). La croissance radiale en fonction de l’âge est la plus faible dans le Briançonnais et la plus forte Les comportements de l’épicéa et du pin cembro sont assez proches, Moyenne-Tarentaise. en croissance radiale relativement forte (rayon moyen de 20 cm à 150 ans), particulièrement avec une sur substrats silicatés et en adret, tandis que celle du mélèze et du pin à crochets est plus faible (rayon * Correspondance et tirés à part Tél : (33) 04 76 51 46 80 ; fax : (33) 04 76 51 44 63 ; courriel : remi.foussadier@ujf-grenoble.fr
  2. épicéa / mélèze / pin cembro / pin à crochets / croissance / étage subalpin INTRODUCTION dominantes, les quatre principaux coni- teurs fères capables de pousser à haute altitude dans les Alpes françaises : l’épicéa (Picea La croissance des arbres poussant en limite abies (L) Karst), le mélèze (Larix decidua supérieure de la forêt ainsi que dans la zone Mill), le pin cembro (Pinus cembra L) et le de combat subalpine a été encore peu étudiée pin à crochets (Pinus uncinata Mill ex en France d’un point de vue dendrométrique, Mirb). Dans un premier temps, la croissance ces forêts étant généralement considérées radiale des arbres en fonction de l’âge cam- plus comme des forêts de protection que de bial est analysée dans quatre régions diffé- production à cause de leurs productivités rentes en recherchant, pour chaque essence, médiocres (Trosset, 1984). une éventuelle influence de la roche-mère Il est pourtant intéressant d’analyser la et de l’exposition. Dans un deuxième temps croissance de ces arbres (Gil-Pelegrin et une analyse par essence est réalisée en Villar-Perez, 1988), car ils poussent dans regroupant, pour chacune d’elles, toutes les des conditions extrêmes qui caractérisent courbes disponibles, afin de comparer leurs leurs limites écologiques (Arquillière,1986). dynamiques spécifiques. La prise en compte Les conifères présents à haute altitude ont de la hauteur moyenne des arbres permet d’ailleurs fait l’objet de plusieurs études enfin de compléter les résultats relatifs à la dendroécologiques (Matthewes, 1976), par- croissance radiale. fois de façon comparative en particulier dans les Alpes (Tessier, 1981 ; Siebenlist-Ker- ner, 1984 ; Petitcolas, 1993) mais le plus MATÉRIEL ET MÉTHODES souvent séparément. Ainsi, dans l’étage sub- alpin des Alpes françaises, Contini et Lava- Les sites d’étude rello ( 1982) se sont intéressés au pin cembro, Serre ( 1978), au mélèze, et Rolland et Les stations étudiées se répartissent dans quatre Schueller ( 1995,1996), au pin à crochets et régions bioclimatiques des Alpes françaises à l’épicéa. De tels sites ont également donné (figure 1)définies par trois facteurs principaux. lieu à des études concernant l’écologie Le premier facteur concerne l’aridité estivale, exprimée par l’angle de Gams estival (Micha- (Fourchy, 1952) et l’écophysiologie des let, 1991 ; Pache et al, 1996), d’autant plus fort espèces (Tranquillini,1979). Ces recherches que les étés sont secs. Le second facteur concerne permettent une meilleure connaissance des les précipitations hivernales : il représente la limites des potentialités des essences fores- continentalité hydrique, exprimée par l’angle de tières et peuvent s’avérer utiles pour le choix Gams hivernal, d’autant plus faible que le cli- d’essences lors de reboisements (Mullen- mat est océanique. Dans la zone étudiée, les angles de Gams estivaux et hivernaux varient bach, 1982), par exemple pour la lutte contre dans le même sens, traduisant l’augmentation les avalanches. concomitante de l’aridité estivale et de la conti- objectif est ici d’étudier, à partir Notre nentalité hydrique en allant des Alpes externes de de largeurs de cernes et de hau- aux Alpes internes. Le troisième facteur est un mesures
  3. Échantillonnage et données numériques facteur thermique : il distingue, parmi les sta- tions de la zone interne (angles de Gams élevés), celles du nord, plus fraîches, de celles du sud, Pour chacune des 37 populations, 12 arbres domi- plus chaudes. Les sites de prélèvements se trou- nants ou codominants relativement à chaque vent dans les régions suivantes, situées entre essence ont été carottés à coeur, à 1,3 m du sol et 44°48’ et 45°30’ de latitude Nord et de 5°54’ à selon trois directions (une carotte en amont et 6°48’ de longitude Est. deux de part et d’autre du tronc perpendiculai- rement à la pente). Les arbres dont le coeur s’est Le Briançonnais, dans les Alpes internes sud- — révélé pourri au sondage ont été écartés. Chaque occidentales à été sec et chaud, où l’épicéa est station de prélèvement a été décrite selon des exclu par la sécheresse estivale. critères floristiques et géologiques (tableau I) détaillés ici avant tout pour permettre de contrô- La Haute-Maurienne, dans les Alpes internes — ler leur représentativité. L’ouverture du peuple- nord-occidentales, à été aussi sec mais aux tem- ment a été estimée (pourcentage de recouvre- fraîches que celles du Briançon- pératures plus ment de la strate arborescente) afin de rendre nais. compte des phénomènes de compétition. La Moyenne-Tarentaise, dans les Alpes inter- Les largeurs de cernes des 1 320 carottes ont — médiaires nord-occidentales, à été assez bien ensuite été mesurées au laboratoire avec une pré- arrosé. cision théorique de 0,01 mm à l’aide d’une chaîne de lecture informatisée. Le massif de Belledonne, dans les Alpes — À partir des brutes des de largeurs mesures nord-occidentales mieux arrosées, où externes (185 667 total), deux paramètres repré- cernes au le mélèze est absent à cause du caractère trop sentatifs de la croissance radiale ont été calcu- océanique du climat. lés successivement pour chaque population (Rol- land et Schueller, 1995) : Dans chacune de ces régions, les stations sont localisées sur deux types de roches mères (cal- le rayon moyen en fonction de l’âge courant - caires et non carbonatées) et réparties selon deux obtenu par le cumul des largeurs (âge cambial) expositions (adret et ubac), soit quatre modalités moyennes des cernes successifs, écologiques par région climatique (deux seule- l’accroissement moyen de la surface terrière — ment pour le massif cristallin de Belledonne où par l’âge courant, obtenu à partir des rayons toutes les stations se trouvent sur roches mères moyens. non carbonatées) et 14 au total. Un seul niveau moyen d’altitude est analysé, celui de la limite forestière, variable ici de1 750 à 2 300 m mais en RÉSULTATS ET DISCUSSION général situé vers 2 000 à 2 100 m. Il s’agit plus de la limite supérieure de la forêt que de celle des arbres isolés. La localisation ainsi que le des- Croissance radiale dans différentes criptif détaillé des 37 populations étudiées sont conditions stationnelles résumés dans le tableau I. Les courbes des rayons moyens par âge cou- L’échantillonnage a été réalisé dans un but rant des 37 populations sont analysées dans dendroécologique, donc en favorisant avant tout la diversité écologique des lieux de prélèvement chacune des quatre régions en recherchant, plus que le nombre d’échantillons par popula- pour chaque essence, l’influence de la roche tion. Il en découle l’impossibilité de calculer cer- mère et de l’exposition (fig 2). Dans tains paramètres dendrométriques (par exemple l’ensemble, le rayon à 200 ans est souvent la hauteur des arbres à 100 ans), et implique de compris entre 10 et 20 cm et n’atteint que rester prudent quant à l’interprétation et la géné- très rarement 30 cm. ralisation des résultats. Seules les situations les plus courantes au Briançonnais regard des quatre modalités écologiques envisa- gées ont été étudiées pour chaque essence, c’est L’épicéa étant très dans le Briançon- rare pourquoi il manque parfois certaines combinai- nais, seules les trois sons de conditions écologiques. autres essences y ont
  4. ubac-roche silicatée n’est pas repré- été échantillonnées et les quatre types de son sentée et que le site du Barbier présente un biotope sont représentées pour chacune sol profond, actif et riche en azote (végéta- d’elles. tion nitrophile), qui contribue probablement Le pin cembro pousse le mieux en adret &mdash; à favoriser la croissance, renforçant ainsi roche calcaire, avec un rayon à 100 ans sur l’influence de l’exposition et de la roche (R proche de 20 cm, et le moins bien en 100 mère. ubac sur roche calcaire avec un R de 10 100 Sur trois populations, le pin cembro se cm. La présence de nombreuses souches montre, comme l’épicéa et avec une crois- dans la station d’ubac témoigne d’une com- sance similaire, plus productif en adret sur pétition importante et explique probable- roche silicatée (même site du Barbier). Pour ment en partie cette croissance plus faible. un même type de station, il pousse mieux Le mélèze présente, lui aussi, une crois- &mdash; que dans le Briançonnais bien que les peu- sance nettement plus forte en adret sur roche plements soient à la fois plus fermés et plus calcaire, sa plus faible croissance étant proches de la limite forestière. observée en ubac sur roche décarbonatée. Une seule population de mélèze a été Cette différence de croissance selon l’expo- échantillonnée en Haute-Maurienne, en ubac sition avait déjà été observée pour cette sur roche calcaire (station du Jeu). Il s’agit essence dans l’étage subalpin de cette région de la seule station de l’échantillonnage dans (Florence-Schueller, 1986). laquelle les quatre essences sont présentes en Le comportement du pin à crochets est &mdash; mélange. La croissance du mélèze y est très proche de celui du pin cembro et du assez faible (R 10 cm), proche de celle 100 = mélèze, avec toujours une croissance plus de l’épicéa et légèrement inférieure à celle forte en adret sur roche calcaire. On ne des pins surtout durant les 100 premières retrouve pas une meilleure croissance en années de vie des arbres. adret sur roche silicatée, alors que Florence- Le à crochets (trois populations) pin Schueller et Rolland (1995) l’avaient obser- croissance plus faible en adret montre une vée dans l’étage subalpin des Pyrénées (R 8 cm) alors que ce sur roche calcaire 100 orientales françaises. Nos résultats ne mon- = de station était le plus productif dans le trent pas non plus de différence nette de type Briançonnais. croissance selon la roche mère, alors qu’une étude réalisée dans l’étage subalpin du Moyenne-Tarentaise Briançonnais et du Queyras a montré une croissance radiale supérieure de 18,6 % sur Ici encore, on trouve les quatre essences substrat calcaire par rapport aux substrats mais avec, selon les espèces, une représen- silicatés (Schueller et Rolland, 1994). tation plus ou moins incomplète des types de biotope. Haute-Maurienne Trois populations d’épicéa ont été échan- Les quatre essences étudiées sont présentes tillonnées. Celle située en adret sur roche dans cette région, mais n’y ont été étudiées silicatée est la plus productive de tout que dans les types de biotopes où elles sont 22,5 l’échantillonnage (R 150 R = 100 cm ; = suffisamment représentées. 30 cm), ce qui correspond au même type de station favorable qu’en Haute-Maurienne. La croissance de l’épicéa (trois popula- tions) est plus faible en ubac sur roche cal- Pour le pin cembro, trois populations ont caire (R < 10 cm) et plus forte en adret sur été échantillonnées également. Là encore, 100 c’est celle située en adret sur roche silicatée roche silicatée (R > 20 cm) dans le site du 100 Barbier. Notons toutefois que la combinai- qui présente la plus forte croissance. Pour
  5. même type de station, le pin cembro (Perrier in Bert, 1992 ; Desplanque, 1997) et un semble pousser encore mieux ici qu’en pour le pin à crochets (Rolland, 1996). En Haute-Maurienne. revanche, le mélèze et le pin cembro n’ont pas encore, à notre connaissance, fait l’objet Nous ne disposons que de deux popula- d’études au moyen de cette méthode. tions de mélèze, en ubac, la meilleure crois- sance étant observée sur roche calcaire. L’homogénéité des courbes de croissance Enfin, deux populations de pin à crochets du pin à crochets d’une part et du mélèze ont été échantillonnées sur roches calcaires, d’autre part permet, pour chacune de ces présentant une croissance moyenne sem- deux essences, de regrouper les courbes de blablequelle que soit l’exposition. toutes les populations, quelles que soient la région considérée, la roche mère et l’expo- Massif de Belledonne sition. Pour le pin cembro et l’épicéa, la ten- dance générale à une croissance plus forte ce massif cristallin externe, toutes les Dans sur roches silicatées nous a conduit à sépa- stations sont situées sur roches mères non rer les populations en deux sous groupes carbonatées. Le mélèze, qui requiert un cli- selon le type de roche-mère. Cette diffé- mat sec et lumineux (Fourchy, 1952), en est rence d’intensité de croissance selon la roche absent en raison des influences trop océa- mère ressort de manière assez nette sur les niques du climat. Le pin cembro arrive juste courbes moyennes mais la forme des en limite occidentale de son aire à Cham- courbes, visiblement propre à l’espèce, reste rousse et l’épicéa trouve ici son extension la même pour une espèce donnée. maximale. La croissance de l’épicéa, du pin Les courbes des rayons moyens en fonc- cembro et du pin à crochets (une seule popu- tion de l’âge courant (fig 3) font nettement lation adret pour ce dernier) est, bien que en ressortir la croissance radiale plus rapide de légèrement supérieure pour l’épicéa, assez l’épicéa et du pin cembro qui atteignent dès semblable quelle que soit l’exposition et 150 ans un rayon moyen de 20 cm, alors plutôt moyenne (R 15 cm). Ce n’est 100 = qu’il faut 100 ans de plus au mélèze et au pin d’ailleurs que dans les conditions édaphiques à crochets pour atteindre un même rayon. les plus extrêmes que le pin à crochets pousse mieux que l’épicéa dans les Alpes Ces similitudes de croissance peuvent externes, par exemple sur lapiaz à lithosol cependant être nuancées par l’examen des dans le Vercors (Rolland, Schueller, 1995). accroissements annuels de la surface ter- rière (fig 4). Seuls le pin cembro et l’épicéa présentent des accroissements moyens de Croissance comparée la surface supérieurs à 10 cm /an (7,5 cm 2 2 des quatre essences /an sur roches carbonatées pour l’épicéa). Croissance radiale L’épicéa présente la période de croissance soutenue la plus longue, allant de 80 à 150 Il est intéressant de réaliser un bilan général ans environ (200 ans sur roches carbona- de la croissance radiale de chaque essence tées), avant de décliner de manière très pro- tous sites confondus, comme l’ont fait Bec- gressive. En revanche le pin cembro montre ker (1987) et Bert (1992) pour le sapin des un pallier de maturité plus court et un peu Vosges et du Jura ou Badeau (1995) pour plus précoce, de 75 à 125 ans. Les simili- le hêtre des plateaux calcaires de Lorraine, tudes apparentes de la croissance radiale de afin de comparer globalement la croissance ces deux essences masquent donc des dif- de ces quatre conifères subalpins. De tels férences assez prononcées de dynamique de résultats ont déjà été obtenus pour l’épicéa croissance.
  6. Il en va de même pour le pin à crochets et dans une moindre mesure), le Briançonnais semblant être son optimum. le mélèze, à croissances radiales très com- parables, mais dont les rythmes d’accrois- Enfin, les pins à crochets sont plus grands sement en surface terrière diffèrent assez ubac sur calcaire (Bri-Ca-N et Mau-Ca- en nettement. Ainsi, le pin à crochets atteint N), comme l’ont déjà signalé Schueller et son maximum d’accroissement vers 50 ans Rolland (1994). et voit sa croissance en surface réduire très Globalement, l’épicéa et le mélèze pré- graduellement dès 70 ans, alors qu’à partir sentent des hauteurs supérieures, proches de cet âge le mélèze présente un pallier moyenne de 20 m, alors que les pins en continu très stable qui semble se prolonger cembro et à crochets atteignent des hauteurs extrêmement longtemps. Ce pallier a plus faibles, proches en moyenne de 15m. d’ailleurs été mis en évidence sur de longues Cette observation n’a rien d’étonnant quand chronologies d’arbres vivants (Tessier, on sait que les bourgeons du mélèze et de 1986). l’épicéa présentent une dominance apicale que l’on ne retrouve pas chez les deux pins, Hauteur dominante au port souvent plus ramifié. La distinction de deux groupes (épicéa et pin cembro d’une Une étude succincte de la hauteur domi- part, mélèze et pin à crochets d’autre part) nante moyenne des populations échan- basée uniquement sur la croissance radiale tillonnées permet de nuancer et de complé- doit donc être nuancée par l’examen de la ter les conclusions concernant la croissance hauteur dominante. Des quatre essences sub- radiale. alpines, c’est donc l’épicéa qui pousse le La structure d’âge des populations étu- mieux, car sa croissance est relativement diées ne permet pas toujours de déterminer forte aussi bien en hauteur qu’en épaisseur. la hauteur à 100 ans. Le détail pour chaque Viennent ensuite le mélèze, qui compense arbre des couples « hauteur / âge » est donc une faible croissance radiale par une assez présenté, en séparant les quatre essences et forte croissance en hauteur, et le pin cembro en distinguant les types de stations par des pour lequel c’est l’inverse. Enfin, le pin à figurés différents (fig 5). La hauteur domi- crochets présente une faible croissance en nante se stabilise au-delà de 100 ans, sauf hauteur comme en épaisseur. pour le pin à crochets vers 150 ans. Seuls En ce qui concerne les différences entre les arbres de plus de 100 ans (150 ans pour régions, le Briançonnais, bien qu’étant la le pin à crochets) seront comparés. région la plus sèche dans laquelle on observe L’épicéa atteint des hauteurs supérieures la plus faible croissance radiale, présente ubac (Tar-Si-N, Mau-Ca-N) et inférieures pour les deux espèces de pins une relative- en adret, en particulier sur calcaire (Mau- forte croissance hauteur. en ment en Ca-S, Tar-Ca-S). toutes les essences, les sta- Enfin, pour Le mélèze présente les hauteurs les plus tions roche mère carbonatée en ubac pré- sur variées. Pour le Briançonnais, elles sont toujours des hauteurs parmi les plus sentent maximales en ubac sur calcaire, intermé- élevées, alors qu’aucune distinction systé- diaires en adret sur silice et minimales en matique entre les types de stations n’appa- ubac sur silice, alors que ce dernier type de raissait niveau de la croissance radiale. au station présente de fortes hauteurs en Taren- Pour résumer schématiquement tous ces taise. résultats, la figure 6 présente, pour chaque Le cembro atteint des hauteurs essence, les différentes populations étudiées plus pin élevées en ubac (Bri-Ca-N, Bri-Si-N et Mau- en fonction de la hauteur moyenne des Ca-N) qu’en adret (Bel-Si-S, et Bri-Si-S arbres échantillonnés et de leur âge moyen,
  7. net chez le la taille des points étant proportionnelle au pin à crochets mais la tendance diamètre moyen atteint à 50 ans. reste la même. L’hypothèse de forêts autre- fois plus denses donc à plus forte concur- L’examen de ces diamètres à 50 ans pour rence paraît peu probable en limite fores- les quatre essences montre que les vieilles tière où les recouvrements sont presque populations ont eu une croissance beaucoup toujours faibles. En revanche, les popula- plus faible dans leur jeunesse que les popu- lations actuellement jeunes. Ceci est moins tions à croissance rapide sont souvent
  8. silicatées et les adrets ; leurs croissances exploitées plus précocement, ce qui explique maximales sont observées en Moyenne- probablement qu’on ne trouve pas de popu- lation à la fois vieille et productive. Tarentaise, les plus faibles dans le Brian- çonnais (pin cembro) et en Haute-Maurienne Un climat devenu plus favorable à la sur roches carbonatées. croissance des arbres pourrait également en être à l’origine. En France, une augmentation Le mélèze et le pin à crochets qui présen- &mdash; récente de la croissance a déjà été mise en des croissances radiales plus faibles et tent évidence par Bert (1992) Becker et al et plus homogènes ; les comparaisons en fonc- (1995) pour le sapin, Belingard et Tessier tion des types de stations sont moins aisées (1994) pour le mélèze du Haut-Verdon, en raison des situations non échantillonnées. Nicolussi et al (1995) pour le pin cembro Ces résultats fournissent des courbes de des Alpes et Badeau (1995) pour le hêtre référence nouvelles sur la croissance radiale de Lorraine. de ces quatre conifères subalpins dans des conditions écologiques variées jusque là peu étudiées. CONCLUSIONS La comparaison de la croissance radiale Cette étude comparative de la croissance des quatre essences tous sites confondus des quatre conifères constituant la limite (surfaces terrières par âge courant) met en supérieure des forêts dans les Alpes fran- évidence des différences notables de rythmes çaises permet de dégager plusieurs résul- de croissance montrant à quel point ces tats, dont l’intérêt est principalement d’ordre quatre conifères, même adaptés à un même sylvicole. type de biotope aux conditions climatiques La comparaison des courbes de croissance très rudes et limitantes, peuvent utiliser des radiale des 37 populations montre l’influence stratégies de croissance distinctes. L’épicéa du climat régional et des conditions station- présente la période de croissance soutenue la nelles. Dans l’ensemble, quelle que soit plus longue (de 80 à 150 ans environ) avant l’espèce, la croissance radiale apparaît la de décliner de manière très progressive ; le plus faible dans le Briançonnais où l’aridité pin cembro montre un pallier de maturité estivale est la plus marquée (G 55 °), et la plus court et un peu plus précoce (de 75 à e > plus forte dans le massif externe de Belle- 125 ans) ; le pin à crochets atteint son maxi- donne et en Moyenne-Tarentaise. La Haute- mum d’accroissement vers 50 ans et voit sa Maurienne occupe une place intermédiaire croissance en surface réduire très graduel- des croissances radiales assez faibles lement dès 70 ans ; enfin le mélèze présente avec substrats calcaires mais plus élevées sur à partir de 75 ans un pallier continu très sur substrats silicatés. Le rôle joué par l’exposi- stable qui semble se prolonger extrêmement tion semble dépendre de la région considérée longtemps. et de la roche mère. L’examen des hauteurs dominantes a per- Ces courbes mettent également en évi- mis de compléter les résultats concernant la dence les caractéristiques de croissance croissance radiale. Des quatre essences sub- propres à chaque espèce en limite altitudi- alpines étudiées, c’est l’épicéa qui produit le nale supérieure de son aire d’extension. On plus de bois car sa croissance est relative- distingue nettement deux groupes parmi ces ment forte aussi bien en hauteur qu’en épais- quatre essences : seur. Viennent ensuite le mélèze, qui com- L’épicéa le pin cembro qui présentent une faible croissance radiale par une et pense &mdash; des croissances radiales relativement fortes forte croissance en hauteur, et le pin assez et semblent préférer les stations sur roches cembro pour lequel c’est l’inverse. Enfin,
  9. Belingard C, Tessier L (1994) Étude dendroécologique à crochets présente une faible crois- le pin comparée de Larix decidua Mill dans les Alpes dans les deux dimensions. sance françaises du Sud. Dendrochronologia 11, 69-78 Cependant, il convient de relativiser la Contini L, Lavarello Y (1982) Le pin cembro (Pinus cembra L). Répartition, écologie, sylviculture et portée de l’ensemble des résultats, car d’une production. Inra, Paris, 197 p part ils sont basés sur un échantillonnage Desplanque C (1997) Dendroécologie comparée du relativement restreint, et d’autre part la com- sapin et de l’épicéa dans les Alpes internes franco- inter-arbres, difficile à prendre en pétition italiennes. Rôles des facteurs climatique et anthro- compte, peut interférer avec les facteurs pique. Thèse, université Joseph-Fourier, Grenoble, 146 p + annexes physiques dans la croissance radiale, bien Florence-Schueller J (1986) Étude dendrologique d’un ici de peuplements en qu’il s’agisse mélézin du Briançonnais. Publication du labora- peu denses. Ces résultats moyenne assez toire d’écologie végétale, université Joseph-Fou- sont donc avant tout générateurs d’hypo- rier, BP 53 X, 38041 Grenoble, France thèses de travail pour de futures études plus Florence-Schueller J, Rolland C (1995) Influence de ciblées, basées alors sur des échantillon- l’altitude, de l’exposition et du climat sur la crois- sance du pin à crochets (Pinus uncinata Ram) en nages moins sensibles aux handicaps d’inter- Cerdagne (Pyrénées-Orientales françaises). Piri- prétation actuels. (Jaca), 145-146, 23-34 neos Fourchy P (1952) Étude sur l’écologie et la sylviculture Remerciements : Nous à remercier tenons Écologie du mélèze (Larix europaea DC). du tout particulièrement Josée Lucas pour son assis- mélèze particulièrement dans les Alpes françaises. tance technique lors de la mesure des 185 667 Annales de l’École nationale des eaux et forêts 13, largeurs de cernes, ainsi qu’Aïsha, Muriel, Esther, 7-137 Vincent, Élisabeth, Clotilde, Jean-Paul, Chan- Gil-Pelegrin E, Villar-Perez L (1988) Structure of Mon- tal, Patty, Catherine, Éric, Gilles, Rémi, Carole et tain Pine (Pinus uncinata Ramond) population at its Serge pour leur aide lors du travail de terrain. upper limit in the Central Pyrénées. Pirineos (Jaca), 131 Matthewes JA (1976) "Little Ice Age" paleotempera- RÉFÉRENCES tures from high altitude tree growth in S. Norway. Nature 264, 18 Nov 1976, 243-244 Michalet R (1991) Une approche synthétique biopé- Arquillière S (1986) Morphologie, croissance, repro- doclimatique des montagnes méditerranéennes : duction végétative de l’épicéa (Picea abies L) dans exemple du Maroc septentrional. Thèse de troi- une zone de combat subalpine : massif du Taillefer, sième cycle, UJF, Grenoble-I, 238 p + annexes Alpes dauphinoises. Thèse de troisième cycle, uni- versité Joseph-Fourier, Grenoble-I, 265 p + annexes Mullenbach P (1982) Les reboisements au voisinage de la limite altitudinale de la végétation forestière Badeau V (1995) Étude dendroécologique du hêtre (limite sylvestre). Exemple de la station du Cha- (Fagus sylvatica L) sur les plateaux calcaires Lor- zelet. Premiers résultats. RFF 34, 50-71 rains. Influence de la gestion sylvicole. Thèse de doctorat, université Henri-Poincaré, Nancy-I. 224 Nicolussi K, Bortenschlager S, Körner C (1995) Increase in tree-ring width in subalpine Pinus cem- p + annexes bra from the central Alps that may be CO -rela- 2 Becker M (1987) Bilan de santé actuel et rétrospectif du ted. Trees, Structure and Function 9, 181-189 sapin (Abies alba Mill) dans les Vosges. Étude éco- logique et dendrochronologique. Ann Sci For 44, Pache G, Michalet R, Aimé S, (1996) A seasonal appli- 379-402 cation of the Gams (1932) modified Michalet (1991) method: the example of the distribution of Becker M, Bert GD, Bouchon J, Picard JF, Ulrich E some important forest species in the Alps. Vol. (1995) Growth trends in various broadleaved and jubilaire J.L. Richard, Diss-Bot 258, J Cramer, coniferous trees in Northeastern France from the Stuttgart, 31-54 mid 19th century. Functioning and dynamics of natural and perturbed ecosystems (D Bellan, G Petitcolas V ( 1993) Dendroécologie comparée de quatre Bonin, C Emig, eds). Technique et documentation, de conifères en limite forestière altitudi- espèces Lavoisier, Intercept Ltd, 1995 nale dans le massif du Taillefer (Alpes du Nord). Rapport de DEA, UJF, Grenoble, Sept 1993, 66 p Bert GD (1992) Influence du climat, des facteurs sta- + annexes tionnels et de la pollution sur la croissance et l’état sanitaire du Sapin pectiné (Abies alba Mill) dans le Rolland C ( 1996) Croissance du pin à crochets (Pinus Jura. Étude phytoécologique et dendroécologique. uncinata Mill ex Mirb dans la réserve naturelle des Thèse de doctorat, Nancy 1, 200 p + annexes hauts plateaux du Vercors. RFF 48, 144-152
  10. Rolland C, Schueller J (1995) Croissance comparée eines Alpinen Hochgebirgsstandortes. Dendro- du pin à crochets et de l’épicéa (Pinus uncinata chronologia 2, 9-29 Ram et Picea abies Karst) sur dalle calcaire kars- Tessier L (1981) Contribution dendroclimatologique tifiée en moyenne montagne tempérée (Vercors, à la connaissance écologique du peuplement fores- 83, 17-32 France). RGA tier des environs des chalets de l’Orgère (parc natio- Rolland C, Schueller J ( 1996) Dendroclimatologie du nal de la Vanoise). Trav Sci Parc Nat Vanoise 11, pin à crochets (Pinus uncinata Mill ex Mirb) dans 29-61 le Briançonnais et le Queyras en fonction des condi- Tessier L (1986) Chronologie de mélèzes des Alpes tions stationnelles. Schweiz Z Forstwes 147, 351- petit âge glaciaire. Dendrochronologia 4, 97- et 363 113 Schueller J, Rolland C (1994) Influence stationnelle sur la croissance du pin à crochets (Pinus uncinata Trosset L ( 1984) Productivité et régénération des pes- Ramond). Schweiz Z Forstwes 145, 739-755 sières subalpines dans les Alpes nord-occidentales. Act Biol Mont 4, 101-114 Serre F (1978) The dendroclimatological value of the European Larch (Larix decidua L) in the French Tranquilini W (1979) Physiological ecology of the Maritime Alps. Tree Ring Bulletin 38, 25-34 alpine timberline. Tree existence at hight altitudes with special references to the European Alps. Eco- Siebenlist-Kerner V (1984) Der aufbau von Jahrring- chronologien für Zirbelkiefer, Lärche und Fichte logical Studies, 31,Springer-Verlag, Berlin, 137 p
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